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Les échos du chaos et de la grotte – Lanvénégen

Circuit des chaos et de la grotte de Stang Ludu

Les échos du chaos de Stang Ludu : Le bonus

Les échos de la grotte et des chaos - Cascade près de Stang Ludu
Un petit ruisseau tranquille gonflé des eaux de pluie cascade près des chaos de Stang Ludu

Le précédent billet qui décrit le circuit de randonnée de  la grotte et des chaos de Stang Ludu  est le fruit d’une collaboration co-rédactionnelle partagée avec Bertrand Penvern.  C’est un homme créatif et amoureux de la nature. Bien installé dans son terroir dont il connait les moindres recoins et tous les particularismes qui vont avec. C’est donc dans un esprit de partage que Bertrand propose de nouveaux sentiers de randonnée qui appellent à une reconnexion avec la nature. Et la commune de Lanvénégen est riche d’une occupation millénaire que l’activité humaine a bien préservée. Ainsi en est-il des chemins creux bordés de murs de pierres assemblés il y a des siècles ou bien encore des ornières dans le granite de Lanzonnet qui témoignent d’une voie de passage majeure de charrettes et autres équipages. Et il y a bien sûr les ruisseaux qui ne se tarissent jamais, même au plus fort de l’été. Un peu plus loin dans le cheminement, la grotte et les chaos de Kerharcangour n’ont pas encore livré leur secret.  Tout ce parcours est nimbé de mystère et au fil de l’itinérance la magie opère. Un petit panneau circulaire vous le rappelle « Ici pas de réseau, pas de WIFI juste le tweet des oiseaux ».  Donc ite missa est : Bienvenue dans ce monde du silence d’où seuls quelques échos du passé remontent.

Les échos du chaos et de la grotte  – anecdotes

Mémoire d’homme à Lanzonnet : Les ornières dans le granite

Les ornières dans le granite attestent d’une voie de passage importante à Lanzonnet, petit village de la commune de Lanvénégen. Bertrand explique que ces marques indélébiles dans la roche dateraient du moyen âge. Il affirme qu’à  l’époque gallo-romaine l’écart entre les roues étaient de 143 cm alors qu’ultérieurement le passage de roue était plus étroit : Vraisemblablement 120 cm. En revenant sur les lieux, la mesure des ornières d’axe à axe mesure effectivement 130 cm. Un ancien se promenant sur le chemin intrigué par notre intérêt nous précise qu’il est un ancien du village. Par le passé  il a donc  emprunté ces chemins avec la charrette et les chevaux. Il précise aussi qu’à cette époque il y avait des charrons et des maréchaux ferrants. Mais précise t’il c’est mon père qui faisait lui même les roues de ses charrettes. Et c’est également lui qui les cerclaient avec une bande de fer.

Les échos du chaos et de la grotte ornières dans le granite
1,30 d’axe à axe : Mesure prise de l’extérieur de la première ornière à l’intérieur de la deuxième ornière.

Mémoire d’homme à Lanzonnet :  Un tracteur dans les ornières

Puis est venu le temps des tracteurs. Il se souvient avoir monté le chemin avec son premier tracteur emportant une remorquée de scories pour épandage sur les prés. Il précisa qu’à l’aller tout se passa bien parce que le poids de la remorque et de son chargement faisait cabrer le train avant du tracteur. Par conséquent, les roues avant flottaient sans atteindre le fond des ornières. Cependant au retour, ce fut une autre histoire. Puisque incidemment l’écartement des roues avant du tracteur avaient la même dimension que les ornières. Alors les choses se compliquèrent pour le cultivateur car la remorque vide ne faisait plus cabrer le tracteur alors que au contraire la pente augmentait la gravité. En conséquence les roues avant se coincèrent dans l’ornière.  Et le tracteur demeura bloqué le temps d’obtenir assistance.

Je me promène tous les dimanches matin entre 9 et 11 heures précisa t’il encore, mais à 11 heures je rentre à la maison car il y a le télé foot ! Voilà une rencontre sympathique comme il en existe tant d’autres sur ces chemins de randonnée découverts et balisés par Bertrand. Cet homme passionné de nature.

La grotte du site de Kerharcangour fut un refuge de résistants

La grotte du diable de Kerharcangour est un lieu très retiré qui nécessite une bonne connaissance de la région. Bertrand raconte que cet endroit servait de retraite stratégique pour les maquisards durant la dernières guerre. Il précise qu’il dormaient dans la grotte loin de la menace ennemie.

La grotte du site de Kerharcangour
La grotte du site de Kerharcangour servit de refuge aux résistants

Les échos du chaos : Bouillie fatale à Stang Ludu

La mémoire collective dit qu’avant guerre, une mère quittant son foyer pour se rendre au travail donna des instructions à la fille aînée :  » Tu prépareras une bouillie pour le repas de tes frères et soeurs  »

La jeune fille obéit aux instructions de sa mère mais au lieu de prendre une bonne farine, elle utilisa par méprise un produit pour traiter les doryphores. Cette ingestion fut fatale :  Tous les enfants de la famille périrent dans cette méprise alimentaire.

Les échos du chaos et de la grotte - vieux puits stang ludu
Le puits de Stang Ludu est comblé. Une ancienne barre de coupe matérialise l’interdiction d’accès au bétail.

Les échos du chaos, Lanvénégen inspire aussi les cinéastes

Assis sur le banc qu’il façonné dans un tronc de chêne mort, Bertrand me dit : « Sais-tu qu’il y a deux films documentaires qui parlent de Lanvénégen ? « .  Ceci conduit à de belles découvertes dont voici des extraits :

Un village sans dimanche à Lanvénégen

Ce film documentaire réalisé par Philippe Baron en 1963. Il raconte l’histoire d’un conflit après guerre entre une municipalité socialiste et le clergé en l’occurrence l’évêché de Vannes. Ce conflit conduisit à la fermeture de tous les offices de l’église et des chapelles de la commune. En représailles tous les membres du conseil municipal furent excommuniés. Le film documentaire un-village-sans-dimanche  est disponible dans les médiathèques sous condition de réservation. Ce film est une perle rare qui donne la mesure du clivage qui s’opéra lors de la séparation de l’église et de l’état suite à la loi de 1905.

Bienvenue Mister Chang

Le 26 février 1982, la commune de Lanvénégen accueillait des réfugiés laotiens. Le film documentaire Bienvenue Mister Chang raconte l’intégration et la recherche identitaire de ces expatriés politiques contraints de migrer.

Ces films documentaires sont disponible en médiathèque sous condition de réservation – Référence médiathèque Matilin an Dall Quimperlé. Ils sont vraisemblablement disponibles dans d’autres médiathèques régionales et  par conséquent à Lanvénégen.

Les échos du chaos  – naturalisme

La sphaigne

La sphaigne a  une capacité d’accumulation jusqu’à 26 fois son propre poids. Elle joue donc un rôle important de stockage et de régulation d’eau dans les sous-bois. Sa croissance est de l’ordre de 7 à 8 mm par an ce qui est également phénoménal en terme de capacité de couverture du sol.  Enfin dans les tourbières, la sphaigne contribue au piégeage du carbone 4 où elle participe à l’accumulation de 1 à 2 mm de tourbe par an. Dans les tourbières l’eau a un taux d’acidité élevé. De ce fait la sphaigne qui se dépose au fond des marécages ne se décompose pas. Au fil des décennies elle forme un matériau combustible qui l’on utilisait pour le chauffage. En relation avec le ruisseau de Pennéven qui ne se tarit jamais, Bertrand précise qu’il traverse des tourbières. Or dans les tourbières il y a de la sphaigne.Les echos du chaos - sphaigne

Vallon de Pennéven à Lanvénégen
Vallon de Pennéven à Lanvénégen

Carex, attention ça coupe !

Le carex comme le jonc est une plante qui pousse en milieu acide car leur système racinaire est adapté aux sols acides, gorgés d’eau et pauvres en oxygène. Attention cependant aux coupures profondes car les feuilles de carex ont des fines dentelures particulièrement coupantes. Le seul fait de les faire glisser le long des doigts suffit à entraîner de profondes coupures. Enfin comme la sphaigne, le carex capte le carbone ce qui est bon pour le climat. Le carex pousse abondamment le long des cours d’eau comme le ruisseau de Pennéven ou encore celui de Saint-Antoine ou dans les zones humides qui bordent le Naïc.

Grotte et chaos de stang ludu - carex sur les rives de pennéven
Le carex pousse sur les rives du ruisseau de Pennéven

De vieux chênes centenaires

Il y a beaucoup d’arbres remarquables sur le circuit de la grotte et des chaos de Stang Ludu. Il y a de beaux spécimens de chêne aux écorces vigoureuses. Certains de ces vieux arbres  creux à l’intérieur sont autant de refuges pour des oiseaux cavernicoles. Bertrand donne un moyen d’évaluation de l’âge de ces vieux chênes. Selon lui, il suffit de mesurer la circonférence de ces arbres pour en connaître l’âge. Il cite la circonférence des chênes de Stang Ludu (commune de Guiscriff) qui fait 5 mètres. Traduit en âge, cela donne 5 siècles pour ces vénérables de Stang Ludu  qui voisinent le ruisseau Saint-Antoine. Or il existe en ces lieux bien d’autres spécimens dont l’âge se mesure en nombre de siècles. NB la mesure de la circonférence s’applique aux arbres à croissance lente. Ce qui exclut certaines essences comme le châtaignier.

Les échos du chaos et de la grotte - chêne verruqueux
Chêne verruqueux qui comporte beaucoup d’anfractuosités qui servent de refuge aux oiseaux cavernicoles

Questionnement sur l’origine du nom de Lanvénégen

Puisque nous sommes sur le territoire de Lanvénégen la question du nom de la commune vient à l’esprit. La francisation des noms de communes entraîne une déperdition de la signification originale. Ainsi Lanvénégen n’est pas signifiant alors que l’origine bretonne transmet beaucoup plus d’information. On peut traduire par lann associé à Wenegan  selon l’office de tourisme du roi Morvan. Lann est traduit par un lieu, un territoire consacré à un saint. Ici en l’occurrence le saint serait Saint-Wenegan ou Saint-Conogan. Le nom final de Lanvénégen ne porte donc plus l’essence originelle.

Saint-Conogan ou Saint-Wenegan Lanvénégen
Statue en bois polychrome dorée à l’or fin de Saint-Conogan

Lanvénégen la tradition cornouaillaise

Les échos du chaos et de la grotte - église de Lanvénégen

Lanvénégen tout comme la commune voisine de Guiscriff, Le Faouët ou Gourin font à l’origine partie de la Cornouaille soit Kerne en breton. Lorsqu’en 1790 ces paroisses ou trêves sont rattachées au diocèse de Vannes. En contrepartie les communes d’ Arzano, de  Rédéné ainsi que celle de Locunolé sont intégrés au Finistère. Ce rattachement fut très mal vécu par la population qui avait des liens importants avec le Finistère. Les liens étaient commerciaux et traditionnels mais aussi linguistiques et cela transparaissait aussi dans le style architectural religieux. Ainsi les églises de Guiscriff comme celles de Lanvénégen sont purement de style cornouaillais. A contrario Arzano comme d’ailleurs la commune de Rédéné portaient des traditions morbihannaises. Cette différence était remarquable, notamment le breton parler comportait beaucoup de variants notamment en terme de prononciation. Quant à la coiffe traditionnellement celle de Pont-Aven dans cette partie du Finistère devenait la coiffe « aéroplane » du pays de Lorient à Arzano et Rédéné.

Complément d’information sur le ruisseau Saint-Antoine

Le ruisseau de Saint-Antoine est l’un des points d’attraction du circuit de la grotte et des chaos. Son appellation vient du fait qu’il  prend naissance près de la chapelle à dévotion de Saint-Antoine. A cet endroit, nous sommes sur un massif granitique où lorsqu’il pleut, l’eau ruisselle rapidement. Par ailleurs, la présence de tourbières constitue  une réserve d’eau importante. C’est pourquoi le ruisseau Saint-Antoine ne se tarit jamais.

Du ruisseau un regard vers la chapelle éponyme semble inévitable. Elle date de la seconde moitié du XVIe siècle. A l’intérieur il y a deux retables baroques magnifiquement décorés. Les vitraux modernes sont l’œuvre de l’atelier HSM à Quintin dans les Côtes d’Armor. La chapelle est dédiée à Saint-Antoine Legrand né au 3e siècle en Égypte, son attribut courant est le cochon

Chapelle Saint-Antoine Guiscriff
La chapelle de Saint-Antoine XVIe siècle – style gothique flamboyant – commune de Guiscriff
chœur de la chapelle Saint-Antoine - Guiscriff
Saint-Antoine figure à gauche dans le chœur de la chapelle. Son attribut est le cochon

Circuit du chaos et de la grotte :  Le soucis du détail

En illustration de la prestation XXL de Bertrand et Alain, voici comme exemple le fléchage du circuit du chaos et de la grotte. Un travail bénévole qui s’apprécie tout au long du parcours.

Les échos du chaos et de la grotte - Lanvénégen
Le fléchage artisanal du circuit des chaos à partir de matériaux de récupération. Et les autres accessoires sur fonds propres

A l’attention des amis randonneurs

Ces chemins ouverts par des bénévoles, amoureux de nature sont exceptionnels de pureté. Alain et Bertrand vous remercie de l’attention que vous leur apporterez. Ils vous remercie également pour le respect de l’environnement en vous priant de ne pas laisser de déchets sur le parcours. Cette demande n’est pas fortuite car ce parcours est un moment de fusion avec la nature qui ne peut s’accomplir que sous la condition d’une prise de conscience d’un équilibre fragile qu’il faut absolument préserver. C’est avec le sens d’un esprit de partage que vous gratifierez le travail généreux de Bertrand et Alain.

Le bonus du circuit de la grotte et du chaos de Stang Ludu

En résumé : «Les échos du chaos et de la grotte» est un parcours initiatique. Qui invite à une découverte active d’un patrimoine naturel et culturel. Ces quelques anecdotes ou observations racontées par Bertrand lors d’une visite du nouveau chemin de randonnée complètent donc le précédent reportage «Circuit de la grotte et des chaos de Stang Ludu».  En effet il y a une telle richesse d’information que cela méritait bien complémentation. 

1 commentaire pour “Les échos du chaos et de la grotte – Lanvénégen”

  1. Une fois de plus, un article bien renseigné, qui nous entraîne à la découverte de ce pays de traditions, d’un patrimoine naturel que certains s’emploient à protéger en nous expliquant le pourquoi et le comment de ce que découvre celui qui sait ouvrir les yeux (et son coeur)

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